Les marchés financiers sont arrivés à un carrefour stratégique majeur, de ceux qui se comptent sur les doigts d’une main au cours d’un cycle. Pour rester dans la parabole routière, les investisseurs ont la possibilité de tourner à droite pour s’engager sur la voie des valeurs décotées et des valeurs cycliques. Ils pourraient aussi aller tout droit et continuer à miser sur la technologie et les entreprises qui ont brillé en même temps que la distanciation physique. Par contre, personne ne semble aujourd’hui envisager une marche arrière ou un demi-tour. C’est presque incroyable après la sortie de route des places financières à la fin de l’hiver dernier. Même le suraccident de la deuxième vague qui sévit actuellement n’a pas vraiment réussi à faire passer le feu au rouge.

Les investisseurs de 2020 sont d’incorrigibles optimistes. Ils se raccrochent aux bonnes nouvelles. Espoirs de reprise économique, agilité des entreprises, nouvelles façons de travailler, alternance politique aux États-Unis, course aux vaccins… Tous les moyens sont bons pour aller de l’avant. Il faut garder à l’esprit que rien de tout cela ne serait possible sans l’inondation de liquidités permise par les banques centrales, qui ont signé des quasi-chèques en blanc aux gouvernements qui luttent contre la pandémie. La sobriété budgétaire érigée en dogme lors de la décennie précédente a volé en éclats. Les monceaux de dette pourraient bien faire reparler d’eux, mais pas avant l’année prochaine.

Ce dont on parle en cette fin 2020, c’est de l’imminence des premières campagnes de vaccination, au compte-goutte d’abord puis plus largement. De rotation sectorielle donc, nous l’avons vu, avec le retour en grâce des mal-aimés. Et du paradoxe asiatique. Berceau de la pandémie de Covid-19, la région est devenue l’épicentre de la reprise économique et probablement la véritable gagnante de cette année 2020 si particulière.

Évidemment rien ne sera linéaire, ce n’est jamais le cas. Les aléas identifiés aujourd’hui ne sont pas forcément ceux de demain. Mais la capacité des marchés à s’être vigoureusement repris au printemps et à avoir déjoué les pièges de l’automne est remarquable. Pour paraphraser un ancien Président de la République française, si on nous avait dit ça il y a 8 mois, on aurait probablement signé tout de suite.

Patrick Rejaunier
© 2020 zonebourse.com, 19 novembre 2020